Le droit à la preuve constitue un élément capital en cas de survenance d’un litige. Bien souvent, l’issue d’un procès dépend de l’administration et de la recevabilité des preuves. C’est pourquoi, depuis plusieurs années, de plus en plus d’agences de détectives privés voient le jour, afin de permettre aux justiciables de se ménager un droit à la preuve.
En France, le cadre juridique admet l’activité de détective privé. Les dispositions relatives aux agences de détectives privés sont contenues dans les articles L621-1 à L624-14 du Code de la sécurité intérieure. Les activités de détective privé sont donc licites, néanmoins, les preuves rapportées par ce biais sont souvent remises en question quant à leur licéité.
Le récent revirement de jurisprudence de la Cour de cassation en date du 22 décembre 2023 est venu apporter un nouvel intérêt aux preuves obtenues de manière illicite ou déloyale, la Cour de cassation admet désormais dans un procès civil l’admissibilité de preuves déloyales. Toutefois, cet usage est assorti de conditions pour éviter toute mauvaise utilisation.
Ainsi, la preuve apportée devra être indispensable au but poursuivi et proportionnée dans son atteinte aux droits de la personne, notamment au droit à la vie privée, par conséquent, ce revirement de jurisprudence ouvre donc la porte à un plus grand usage des agences de détectives privés. Un arrêt récent de la Cour d’appel de Dijon a d’ailleurs admis la validité d’un rapport de détective privé au regard des deux conditions posées par la Cour de cassation (CA Dijon, 29/02/2024, n°22/00145).
En l’espèce, une salariée avait été photographiée en train de travailler pour une entreprise concurrente en dépit d’une clause de non-concurrence. La Cour d’appel a retenu la validité du rapport au motif que les photographies avaient été réalisées depuis des lieux publics.
En cas de litige, les juges apprécieront donc souverainement, au regard des deux conditions précitées, l’admissibilité d’une preuve déloyale.
Malgré l’admission de preuves déloyales dans un procès civil, force est de constater que les rapports de détective privé sont souvent remis en cause et parfois jugés irrecevables.
Dans un arrêt en date du 26 juin 2024, la Cour d’appel de Paris a jugé que la filature d’un salarié par un détective privé dans le but de prouver le non-respect d’une clause de non-concurrence n’était pas indispensable au droit à la preuve de l’employeur, celui-ci ayant eu d’autres possibilités d’obtenir cette preuve (CA Paris, 26/06/2024, n° 21/09010).
En outre, la Cour de cassation a pu approuver une Cour d’appel d’avoir caractérisé une atteinte à la vie privée à l’encontre d’un salarié ayant été pris en filature durant plusieurs heures par un détective privé (Soc., 26/09/2018, n°17-16.020). Pareillement, un détective s’étant fait passer pour un client dans le but de démontrer un exercice illégal de la profession d’expert-comptable a été jugé irrecevable (CA Aix-en-Provence, 18/012024, n°23/03395).
En somme, le recours à un détective privé
doit respecter une certaine mesure et une certaine proportionnalité sous peine de voir le rapport frappé du sceau de l’irrecevabilité, dans certaines situations il est donc plutôt opportun de se tourner vers un Commissaire de justice dont les actes sont authentiques et constituent des preuves parfaites.
Réaliser un constat ou une sommation interpellative peut s’avérer extrêmement favorable dans l’issue d’un procès.